Bilan de ma randonnée de Moissac à Cluny

sur le chemin de St Jacques de Compostelle

 

 

1) Distances et temps

 

674,5 kms séparent ces deux villes moyennes françaises. Ils ont contribué aussi à traverser intégralement la première unité géographique naturelle de France qu’est le Massif Central. En fait, de ses bordures sud-ouest, frontalière du Bassin Aquitain, à ses limites nord-est dominant le Sillon rhodanien. De la vallée de la Garonne près d’Agen à - presque- celle de la Saône non loin de Mâcon. Une distance qui recoupe de nombreux paysages français.

 

674,5 kms c’est 2/3 de la distance entre Perpignan et Dunkerque ou Metz-Avignon en train.

 

Ces 674,5 kms ont été effectués en 53 jours soit pas loin de 2 mois. La moyenne journalière s’établit donc à 12,72 kms/jour. Sachant que la moyenne que je me fixe au départ de la randonnée est de 12 kms/jour, cela fait une avance de 38,16 kms ou plus de 3 jours. J’aurai dû prendre un jour de pause  supplémentaire entre Dancé et Cluny , trajet effectué d’une traite en 10 jours consécutifs ; ce qui a provoqué un début de fatigue en parvenant au but.

 

En réalité, j’ai marché seulement pendant 48 jours ; là, la moyenne est de 14,05 kms ce qui est honnête vu le profil de moyenne montagne parcouru. L’étape la plus longue de La-Chapelle-en-Lafaye à Montbrison s’élevait à 22,8 kms. Cette longueur s’explique par un profil en hauteur favorable (descente des Monts du Forez vers la plaine orientale du même nom malgré un gros orage) mais, surtout, faute d’hébergement et d’espaces peu favorables pour planter la tente, j’ai suivi la D 5 de St-Georges-Haute-Ville à Montbrison (+ 6 kms) où j’étais sûr de trouver à me loger.

 

L’étape la plus courte s’est faite d’Espalion à St-côme-d’Olt : seulement…6 kms le long du Lot, donc en terrain plat et ce, après une journée de pause ! Explications : la journée de pause était tombée sur un dimanche, les courses diverses ont été décalées d’un jour d’où, logiquement grosse perte de temps. Ensuite, en étudiant bien la carte, j’ai voulu raccourcir ce que beaucoup font d’un coup : St-Chély-d’Aubrac – Espalion mais tendance descente ! Dans mon cas, il fallait, allant dans le sens contraire, ménager mes forces sur les premières pentes sérieuses de l’Aubrac (+ 550 m de dénivelé ascendant) en attendant la suite des évènements : + 570 m entre St-Chély et le point culminant du GR 65 au nord d’Aubrac.

 

La répartition des étapes par catégorie donne le résultat suivant :

 

 

  kms

Nombre d’étapes

 %

 0.1- 8

          1

 2

 8,1- 12

        16

33

12,1-16

        17

36

16,1-20

        13

27

+ 20,1

          1

 2

   site 10.jpg

 

L’écrasante majorité des étapes - 96% - se situe entre 8,1 kms et 20 kms ; 2/3 des étapes comportaient des distances nettement au-dessus de 12,1 kms de quoi occuper la journée « moyenne » sieste comprise ! Très peu d’écarts « extrêmes » : seulement 4% ; comparé à d’autres grandes randonnées publiées sur ce site, le rythme a été beaucoup plus régulier au prix du moyenne générale à peine plus faible.

 
2) Guides, cartographie et balisage de l’itinéraire

 

Contrairement aux autres grandes randonnées réalisées, cet itinéraire a ceci de particulier : il na pas été construit par moi-même ; en somme, ce n’est pas un parcours « libre » mais « imposé » comme on dirait en patinage artistique. Il suffisait de faire confiance aux topoguides qui couvrent l’intégralité du parcours. Leurs titres font logiquement référence aux fameux chemins vers Saint-Jacques de Compostelle.

 

De Moissac au Puy, j’ai utilisé les 2 topoguides publiés par la FFRP Figeac-Moissac et Le Puy- Figeac . A mon avis, leurs contenus sont excellents ; j’ai apprécié la partie « infos pratiques » et notamment le tableau synoptique mettant en parallèle les ressources et les localités. Il manque une colonne pharmacie. La liste des adresses est fort pratique mais quelquefois sélective, ex : on signale, à St-Alban-sur-Limagnole, le très onéreux hôtel « Le Relais Saint-Roch » mais l’ « Hôtel du  Commerce » n’y figure pas…

 

Ce qui fait l’intérêt de ces topoguides, c’est l’excellente description : d’un côté, à droite de la page, le descriptif simple du chemin agrémenté de quelques commentaires sur les lieux ; à gauche, l’extrait de carte IGN avec la surcharge du GR 65. C’est cela qui est, à mon avis, le point fort du guide. L’échelle du 1/50000 est la plus appropriée car les détails sont encore visibles sans sacrifier le contexte topographique, ce qui permet, en cas d’erreur, de mieux s’y retrouver voire de pouvoir recomposer son itinéraire.

 

Cas concret : en quittant Cahors, j’ai fait l’erreur d’emprunter le GR 36 et non le GR 65. Sur le haut du plateau, après une montée très dure de 160 m, deux solutions se présentèrent. Normalement, dans ces cas, on revient en arrière mais c’était perdre le bénéfice de la montée ; l’examen attentif de l’extrait de carte page 52 du TG Figeac-Moissac m’a permis de retrouver le GR 65 à 500 m à l’ouest de Flaujac-Poujols en parcourant essentiellement des petites routes.

 

Ci-dessous l’extrait concerné du topoguide  652, avec la correction (le chemin que j’ai suivi finalement).

   

carte-Lot_0001.jpg

 

 

Ce n’était pas le seul avantage ; les cartes servent aussi à faire mieux que l’itinéraire proposé. Elles permettent de contourner certains obstacles comme l’accès occidental du site de Conques car le sentier n’est plus que sa caricature : « un mur » m’affirmait un pèlerin, et donc, dangereux surtout par temps humide. L’emprunt de la D 232 est plus commode à parcourir. Entre l’église du Trédou et celle Saint-Pierre-de-Bessuéjouls, pourquoi grimper sur le plateau ? Pour avoir une rampe ascendante, plus régulière à partir de St-Côme-d’Olt, j’ai suivi la D 557 qui traverse de jolis hameaux sur le VRAI itinéraire de St Jacques et évite la contre-pente qui passe par la Rozière ; grimper 573m, cela suffit entre St-Côme et les Cambrassats !

 

Quant au balisage blanc/rouge, il est excellent et évite qui de se perdre, qui de consulter carte et boussole. Regrettons simplement qu’il n’est fait nulle part allusion que le GR 65 fait partie de l’itinéraire européen allant/venant de St-Jacques de Compostelle en Espagne à Istanbul en Turquie sous la désignation E 3.

 

Du Puy à Cluny, les choses changent radicalement. C’est pratiquement fini avec le célèbre marquage GR de la FFRP, place à la coquille jaune stylisée sur fond bleu ! Personnellement, je l’appelai l’étoile des Mages parce que c’est aussi un signe directionnel selon l’emplacement de la pointe. Cela me rappelle quelques techniques de marquage utilisées en Allemagne de l’Ouest. C’est astucieux si c’est correctement placé et sans ambiguïtés ; or, il y a eu quelques -rares- contre-sens. De fait, ils ne me concernaient pas, vu que j’allais dans le sens opposé. Autre effet pour moi, j’ai du systématiquement consulter cartes et boussole ; c’est cela le désavantage des indications monodirectionnelles.

Sur cette partie du parcours, finies les pratiques TG ; maintenant, je me suis appuyé sur 3 bases documentaires de base :

 -un guide français « Les chemins de St-Jacques-de-Compostelle » publié par Chamina et décrivant le linéaire « De Cluny au Puy-en-Velay » et « De Lyon au Puy-en-Velay ». La présentation rappelle celle des guides de la FFRP sauf que l’on découpe l’itinéraire en étapes de 22,5 kms en moyenne. Celles-ci sont redécoupées en tronçons de longueurs très inégales souvent appuyés sur des possibilités d’hébergement. L’ensemble est bien documenté et clair mais l’ordonnancement cartes/textes est quelquefois compliqué. 2 reproches cependant : la variante allant d’Egarande au sud de Montarcher au Puy n’y figure pas, bien que plus agréable et moins casse-pattes ; enfin, le tronçon 1 de l’étape 4 (Le Cergne-Charlieu) est très mal tracé m’obligeant à faire une recomposition d’itinéraire. Faut-il le répéter, le randonneur aime les profils simples, faciles à parcourir.

 

-deux guides en langue allemande. Le premier « Wandern auf dem Jakobsweg von Trier nach Le Puy » publié par les éditions Dumont-aktiv rédigé par Heinrich Wipper ; le second, « Deutschland-Frankreich : Jaakobsweg Trier-Le Puy » publié par l’éditeur Stein dans la collection « Outdoor : der Weg ist das Ziel » conçu par Ingrid Retterath. Quelles différences ? Le premier est très clair avec de belles illustrations avec des petits plans de villes d’importance (Metz ou Dijon) ou plus secondaires (Toul, Beaune). Ceci est très utile pour le randonneur pour éviter de se perdre dans le maquis urbain. Le second, bien que plus maniable, est une mine de renseignements de toutes natures qui fait le bonheur de l’utilisateur : que demander de plus ! Points communs : le point origine est la ville de Trèves (Trier) qui, comme Metz, est baignée par la Moselle (Mosel). C’est aussi un lieu de pèlerinage important (tunique du Christ) et point de jonction de quelques itinéraires venus du Nord, par ex, de Cologne (Köln). Sur le territoire allemand, il ne parcourt que 47 kms sur un total de 853,5 kms soit, à peine 5,5% du chemin. Ce qui est intéressant, c’est que, de la frontière D/F à Perl/Apach jusqu’à Metz, les auteurs passaient par un itinéraire préexistant au balisage FFRP rouge/blanc (GR 5F). Celui-ci est entré en vigueur seulement en  2010 conçu comme raccord avec le GR 5 (E 2 de La Haye à Menton). Au sud de Trèves, jusqu’à la frontière, le balisage est celui de la coquille.

 Ce sont, les seuls- à notre connaissance- qui décrivent- la variante  Egarande au Puy. Pas étonnant qu’on y rencontre une majorité d’allemands ! Quelle cartographie ? Tous les deux proposent dans leurs ouvrages  des schémas de parcours au 1/200 000ème. C’est bien trop petit ! On propose quand même de se référer à la série verte de l’IGN au 1/100 000ème : c’est très risqué mais peut suffire à la condition expresse que le balisage soit parfait sinon, il faut se procurer de nombreuses cartes au 1/25 000ème et faire une transcription planimétrique à partir des schémas proposés. C’était mon choix, à défaut de trouver des cartes au 1/50 000ème que l’IGN ne vend plus dans le commerce. Logique : 1 carte au 1/50 000ème couvre l’espace de 4 cartes au 1/25 000ème , une bonne affaire pour l’entreprise publique!

 

 

3) quelle météo ?

 

     De Moissac  au Puy, donc de fin avril à la fin mai, le pays a souffert de la sécheresse et même d’une canicule prématurée. Le randonneur a fait face à la chaleur qui l’a obligé, de boire jusqu’à 5l d’eau par jour. Dans le Causse du Quercy, où l’eau est rare, priorité absolue au repérage-comme dans le désert !-des points d’eau vitaux car ils ne sont pas nombreux dans ces contrées karstiques. La preuve : à Labastide-Marnhac, une rue se dénomme « Rue de la soif »(sic !).  Deuxième inconvénient : le soleil qui tape, le fameux « cagnard » des gens du coin. Les dessus de mes mains ainsi que la nuque ont pris un coup. Troisième inconvénient : s’arrêter, se reposer, faire la sieste au milieu de la journée devient difficile avec la canicule car le couvert végétal est très médiocre ; en effet, les forêts de chênes verts ou de pins-même parasols !- ne donnent qu’une ombre peu dense. On finit par se déshydrater. Enfin, bizarrement, avant d’arriver au Puy le 28/5, un grand froid s’est abattu sur le col de l’Oeuf (1230m) alors que je campais. Il a même gelé avec un effondrement du thermomètre à…-3° ! d’après les régionaux. Le matériel a tenu bon. 2 orages ont tonné mais rien de spectaculaire.

                                                                                                                                                                                                      Du Puy à Cluny, les choses changent sensiblement. Les températures sont plus fraîches et le temps est plus humide sans exagérations. Une étape s’est déroulée sous une pluie quasiment continue agrémentée d’un vent fort soufflant du nord-ouest c’est-à-dire dans le sens contraire de la marche. C’était entre Le Cros et St-Georges Lagricol (18kms). Là, l’imperméabilité de mon poncho était remise en cause. A réviser, donc.